Depuis qu'il était devenu photographe d'aviation au Bourget, les affaires marchaient plutôt bien pour mon grand-père André ALIBERT, avec une actualité aéronautique intense à cette époque et le passage au studio de nombreux aviateurs. Afin d'offrir à ses 3 filles et à sa femme un environnement plus agréable, à la campagne et avec un jardin, il acheta en 1934 une propriété à Loisy-en-Brie dans la Marne.
Le Castel Saint-Hubert
Cette propriété était un ancien rendez-vous de chasse perdu dans les vignes de Champagne et orné de tourelles qui lui donnaient un certain charme. Depuis la Mairie de Loisy, il fallait gravir le "raidillon" de la rue Saint-Nicolas, pour arriver à un portail en ogive flanqué de 2 tourelles et de murs d'enceinte ornés de meurtrières, créneaux et mâchicoulis. Une grange imposante servait de réserve à bois et de garage pour les voitures.
Vue du portail depuis un ancien château d'eau situé sur le terrain d'en face |
Côté rue
En continuant le chemin après la grange, une clôture maçonnée surmontée d'une palissade en bois fermait une cour triangulaire située face à la grange. Un portillon permettait d'entrer à pied dans la propriété en descendant quelques marches.
Vue de la cour devant la grange |
En traversant cette cour, on arrivait à un perron, flanqué de deux vases en fonte garnis de fleurs, qui descendait sur une allée cimentée qui longeait 2 bâtiments construits en enfilade. Sur la gauche était la partie habitation, et à droite la partie qui fut aménagée en studio de photographie, où mon grand-père exerça quelques années avant de prendre sa retraite. À chaque extrémité du bâtiment se dressait une tourelle.
Vue de la façade de la maison depuis l'ancien château d'eau |
Bien que la toiture présentait en façade 3 fenêtres en chiens-assis, les combles n'étaient pas aménagés à cette époque.
Côté jardin
Face au perron, une porte donnait sur la pièce principale, qui servait d'entrée, de séjour et de cuisine. On ressortait côté jardin par une sorte de sas hexagonal, surmonté d'un toit pointu dans le style des tourelles. Sur la gauche s'étendait un grand verger avec des pruniers et autres arbres fruitiers. Sur la droite, le potager, et devant la maison une zone en jardin d'agrément avec un puits, très fleurie en été.
Vue du jardin depuis le sommet du grand sapin |
Sur
la photo ci-dessus prise depuis le grand sapin, on aperçoit à droite
de la tourelle ouest une avancée vitrée côté sud qui avait été utilisée comme studio de prise de vue en lumière naturelle. Lorsque
j'ai connu cet endroit, il était utilisé par ma grand-mère comme
buanderie, avec une lessiveuse en fer galvanisé posée sur un trépied à gaz, et une curieuse machine à
laver en bois constituée d'un baquet dans lequel on pouvait faire
tourner des pales en bois avec une manivelle.
Je
me souviens qu'étant enfant, j'aimais entrer dans cette tourelle où
l'on pouvait descendre quelques marches qui s'arrêtaient sur un sous-sol inondé. J'y jouais de la flûte
dont le son, transformé par les résonances et les
échos, devenait magique.
L'intérieur de l'habitation
Rentrons à nouveau dans la maison par le sas hexagonal et faisons le tour de la pièce à vivre de la maison. Sur la gauche, l'évier en pierre sous la fenêtre donnant sur le jardin, qui servait aussi bien pour la vaisselle que pour la toilette, puis une porte donnant sur une grande salle à manger où l'on reviendra par la suite.
Un fourneau en fonte brûlait en permanence du bois ou du charbon était installé sous le linteau d'une grande cheminée qui servait de hotte. Ma grand-mère l'utilisait pour la cuisine, et pour avoir de l'eau chaude. Dans son four, il y avait en permanence des briques chaudes, que nous enveloppions dans du papier de journal pour aller nous coucher dans la chambre froide et humide, même en été, quand j'y venais avec mon frère Jacques pour les vacances.
Dans l'angle à droite du fourneau, il y avait un petit réduit qui servait de garde manger, et au milieu de la pièce, la table qui servait pour les repas quotidiens.
Dans le coin juste avant les quelques marches qui montaient vers la porte d'entrée principale, il y avait le fauteuil de mon grand-père, et juste au-dessus une étagère avec la radio, un modèle à lampes des années 50. Le soir avant le dîner, il s'asseyait dans son fauteuil pour écouter les informations sur "Luxembourg". Il y avait aussi dans ce coin un petit bureau noir, surmonté de rayonnages avec des livres.
En face de son fauteuil, il avait un buffet haut en bois de style Henri II qui servait de vaisselier. À droite de ce buffet était fixé un téléphone mural en bois vernis équipé d'une manivelle qui servait à appeler l'opératrice. Plus à droite, une porte donnait sur les chambres, puis un second buffet bas sans style qui servait à ranger les ustensiles de cuisine, avant de retrouver l'entrée de la véranda.
Cette porte donnait sur la chambre des grands-parents, avec 2 lits jumeaux en bois et une armoire à glace. Au fond à droite, une autre porte donnait sur une seconde chambre en enfilade, dans laquelle il y avait une armoire, un grand-lit de fer avec un édredon énorme, et plusieurs lits d'enfants. Une porte-fenêtre donnait directement sur le jardin, très agréable en été le matin.
Téléphone MARTY en vente sur Le Bon Coin... |
Intérieur du bâtiment ouest
Depuis la pièce à vivre, on accédait à la salle à manger par une porte donnant sur un passage qui traversait le mur de refend entre les 2 bâtiments. Cette très grande pièce n'était utilisée que lorsqu’il y avait des invités à déjeuner.Elle était meublée d'une grande table très massive, et de différentes boiseries dont les portes étaient ornées de vitraux. Mais ce qui me faisait peur étant enfant, ce sont les têtes de gibier empaillées qui ornait les murs : sanglier, cerf, et autre bestioles qui restaient de l'époque révolue où cette propriété était un rendez-vous de chasse. Toutefois, à ma connaissance, mon grand-père n'était pas chasseur, ou tout au moins chasseur d'images.
Janine au piano et André au violon |
Dans un angle à gauche de la cheminée qui était adossée à celle de la cuisine, il y avait le coin piano et musique. Sur cette photo, ma mère est au piano et son père au violon. Au-dessus sur la gauche le cadre avec la photo du grand-père Adolphe.
Repas de famille en 1966 (photo Bernard ARNOUL) |
En continuant vers l'ouest, une porte au fond de la salle à manger donnait sur différents locaux du labo photo, dont une pièce pour recevoir les clients et qui donnait sur le studio de prise de vue.
Vitrine dans la boutique de photographie à Loisy |
Les dépendances
L'allée cimentée, où nous avions l'habitude de jouer avec le cheval à manivelle à roues métalliques, donnait à l'est sur une sorte d'enclos qui avait été un chenil. Les niches à chien sous un auvent en tuiles avaient été remplacées par des clapiers.
La porte sud du chenil et les clapiers |
En sortant du chenil, en se dirigeant à l'est, on passait devant une seconde grange plus petite où mon grand-père avait installé son atelier d'ébénisterie, avec des établis, et toute une série d'outils en bois qui lui venaient de son père. Il y avait aussi un tas d'objets divers, je me souviens particulièrement d'une carde à laine qui servait à refaire les matelas.
Ouest <--- Photo aérienne prise dans les années 1950 ---> Est On peut voir à gauche l'ancien château d'eau du sommet duquel sont prises quelques photos |
Face à cette grange, il y avait un bâtiment parallélépipédique au toit en terrasse orné de créneaux, dans lequel il y avait des box dédiés initialement à l'hébergement de chiens de chasse, mais qui avait aussi servi à l'élevage de cochons pendant la guerre. Avec mon frère Jacques, nous l’appelions la "cochonnerie". Mon grand-père y rangeait ses outils de jardin et notamment son "Agriette", un motoculteur qu'il avait acheté pour faciliter le bêchage du potager. On voit très bien ce bâtiment cubique avec ses créneaux sur cette photo aérienne de la propriété.
Bernard ARNOUL aux commandes de l'Agriette avec toute la famille à Loisy en 1967 (Photo Janine ALIBERT)
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Vue de la propriété de Loisy-en-Brie en 1960 depuis le grand sapin. |
Le portail en 1952 |
Sur cette photo prise à Loisy en 1952 lors des fiançailles de mes parents, on voit devant la voiture de l'entreprise d'électricité ARNOUL et Cie, Alice GÉANT veuve ARNOUL, son fils Bernard et sa financée Janine, sa sœur Andrée, mes grands-parents André ALIBERT et Jeanne Lucie EHRÉ.
Quelques photos André ALIBERT
Je vous propose ici quelques belles photos de la propriété sous la neige, avec ma grand-mère et 2 de ses filles. Il s'agit comme toutes ces photos de négatifs sur plaques photo en verre que j'ai numérisés et inversés, comme je l'ai expliqué dans mon article n° 29 sur la Famille EHRÉ. C'est très émouvant de découvrir et de faire revivre ces images du passé.
Vue côté jardin du haut d'un grand arbre |
Vue de la maison côté chemin |
Vue du chemin sous la neige. La personne sur la photo en manteau foncé est Janine ALIBERT, ma mère. |
État des lieux en 2000
Dominique et moi sommes allés visiter les lieux en novembre 2000, au cours d'un week-end que nous avons passé à Reims, où nous avons visité la cathédrale et des caves de Champagne.
La propriété était dans un état assez triste. Jugez plutôt :
Le portail rue Saint-Nicolas (photo Jean-Paul ARNOUL) |
La façade côté rue (photo Jean-Paul ARNOUL) |
La tourelle Ouest (photo Jean-Paul ARNOUL) |
Corvée de bois (Photo Bernard ARNOUL) |
Jean-Paul ARNOUL
Lien sur le Castel Saint-Hubert sur Google Maps